Descendante d’une famille grecque chassée d’Asie Mineure, Hélène Ahrweiler-Glykatzi participe activement à la Résistance puis s’inscrit, juste après la guerre, à la section historique de l’université d’Athènes et suit les cours du byzantiniste grec Dionyssios Zakythinos. Boursière du gouvernement français, elle poursuit ses études historiques à l’École pratique des hautes études après une brève expérience professionnelle au Centre d’études d’Asie Mineure à Athènes (1950-1953). En France, elle mène de front une carrière de chercheuse au CNRS et une thèse de doctorat d’État publiée sous le titre Byzance et la Mer (1966). Ce travail, qui s’inscrit dans la lignée des études sur les institutions administratives de Byzance, l’impose dans le monde universitaire et lui permet d’être nommée à la Sorbonne en 1967. Après un séjour de recherche à Dumbarton Oaks au début des années 1970, elle publie un nouveau livre, L’Idéologie politique de l’Empire byzantin (1975), où elle tente de montrer que grécité et orthodoxie devinrent progressivement la base de l’idéologie byzantine et servirent à fonder jusqu’à nos jours la continuité grecque. La notion de continuité, élargie à l’espace européen, est également traitée dans deux livres parus en 2000, The Making of Europe et Les Européens, recueil d’études qu’elle codirige avec Maurice Aymard. Cet ouvrage, véritable voyage dans le temps, de l’Antiquité au XXe siècle, s’inscrit dans une problématique transnationale : le but est de cerner l’Europe pluriculturelle, qui n’en reste pas moins « une et reconnaissable » sous tous ses aspects. H. Ahrweiler-Glykatzi devient la première femme présidente de la Sorbonne (1976-1981) puis rectrice de l’Académie de Paris (1982-1989), avant de présider le Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou (1989-1991). Spécialiste de l’époque byzantine, mais tout autant versée dans l’étude de l’Antiquité et de la Grèce contemporaine, elle contribue par ses travaux historiques au renforcement de la conscience européenne. Hellène par naissance, Européenne par conviction, elle est partie prenante d’une Europe vue comme « une seule grande patrie ».
Loukia EFTHYMIOU