Née en Égypte dans une famille turque, Nil Yalter grandit à Istanbul, où elle se forme en autodidacte à la peinture. En 1965, elle se rend à Paris pour se familiariser avec l’art moderne occidental et commence un travail de peinture abstraite géométrique. Les événements de Mai 1968, le Mouvement de libération des femmes, un nouveau séjour en Turquie en 1971, où elle est marquée par la sédentarisation forcée des nomades et la rencontre avec l’ethnologue Bernard Dupaigne sont autant de sources d’inspiration pour son œuvre. En 1973, elle bénéficie de sa première exposition personnelle au musée d’Art moderne de la ville de Paris. Elle montre une tente de nomade, Topak-ev (« la yourte », Santralistanbul, musée d’Art contemporain d’Istanbul). Sur les panneaux extérieurs, des dessins et des textes expliquent les conditions de vie des populations nomades en Turquie. En 1974, N. Yalter réalise sa première performance vidéo, La Femme sans tête ou la Danse du ventre, au cours de laquelle elle inscrit sur son ventre un texte de René Nelli extrait d’Érotique et civilisation tout en se balançant au rythme d’une musique orientale. En 1974-1975, elle crée, avec la peintre Judy Blum et la vidéaste Nicole Croiset, La Roquette, prison de femmes (Fonds national d’art contemporain, Paris), installation multimédia qui reconstitue le vécu des prisonnières grâce au témoignage d’une ancienne détenue. Dans les années 1980, elle continue à travailler sur des sujets liés aux déplacements des personnes ou à leur position subalterne, en produisant toute une série de travaux sur l’immigration et les populations ouvrières (avec N. Croiset, Les Métiers de la mer, 1982) qui traduisent son engagement communiste. En parallèle de ces œuvres qu’on peut qualifier d’« art ethnocritique » ou « sociocritique », elle poursuit une création picturale beaucoup plus formaliste, influencée par les constructivistes russes, en particulier Kazimir Malevitch. Peinture et travail multimédia se rencontrent ainsi dans Sound of Painting (2008).
Fabienne DUMONT
Consultez cet article illustré sur le site d’Archives of Women Artists, Research and Exhibitions