Née dans un hôpital psychiatrique, enfant illégitime d’une mère blanche et d’un père noir, Bessie Head est confiée dès la naissance à des familles adoptives, puis, à 13 ans, elle est placée dans un orphelinat de missionnaires. Sa vie et son œuvre seront profondément marqués par l’expérience traumatique que constituent sa naissance et son enfance. En 1964, elle s’exile comme réfugiée politique au Botswana, où sa vie s’achèvera brutalement à l’âge de 49 ans. Dans son travail, elle cherche à montrer que l’instauration de l’apartheid constitue le péché originel de la politique sud-africaine, la damnation des Blancs et celle du métissage des races. Son écriture s’inspire d’abord de son expérience personnelle. Les thèmes qui la traversent sont l’exil, la solitude, le droit à la différence raciale et sexuelle, l’exclusion et la folie. Émaillée de références bibliques et d’allusions aux grands textes classiques de la littérature anglaise (Shakespeare et D. H. Lawrence, en l’occurrence), son œuvre éclectique échappe aux étiquettes d’« africaine » ou de « féministe ». Publié en 1968, son premier roman,
La Saison des pluies,
raconte l’histoire d’un réfugié politique qui fait d’abord de la prison en Afrique du Sud avant de s’exiler au Botswana où il finira par se suicider. Elle s’impose avec son troisième roman,
Question de pouvoirs (1973). Le personnage principal, Elizabeth, s’expatrie au Botswana et s’installe dans un village où elle entretient une relation avec un homme, Sello, au travers de laquelle elle met en scène toutes sortes de fantasmes, notamment des abus sexuels et des tortures psychologiques, qui renvoient en réalité à ses propres troubles mentaux et à son histoire personnelle.
Frida EKOTTO