Amie de l’orateur Cicéron, qui la mentionne souvent dans sa correspondance pour son amour de la philosophie et ses talents intellectuels, Cérellia était une riche patricienne, instruite et indépendante. Bibliophile, elle avait sa propre bibliothèque, constituée de copies de manuscrits qu’elle se procurait personnellement. Elle fut la première à entrer en possession d’un exemplaire du De finibus de Cicéron, copié à l’insu de son auteur. La nature de sa relation avec Cicéron intriguait déjà ses contemporains. Les plus mal intentionnés reprochaient à l’orateur la fréquentation adultère et licencieuse d’une femme beaucoup plus âgée que lui, pour laquelle il aurait répudié son épouse (Dion Cassius, Histoire romaine, XVIL, 18, 4). En réalité Cérellia, probablement veuve, avait prêté de l’argent à Cicéron lorsqu’il était dans le besoin (Cicéron, Ad atticum, XII, 51 ; XV, 26) et, loin d’être une cause de trouble dans son mariage, elle avait essayé de le réconcilier avec Publilia (Ad att., XIV, 19). La correspondance entre hommes et femmes qui n’étaient pas liés par la parenté prêtait facilement aux spéculations et aux interprétations équivoques, mais l’amitié entre Cicéron et Cérellia était née de leur passion commune pour la littérature et la philosophie (Ad att., XIII, 21). Malheureusement les lettres adressées par Cérellia à Cicéron ne nous sont pas parvenues (elles ne furent pas publiées), mais le ton devait en être personnel, d’autant plus que dans ses lettres Cicéron montre une affection certaine pour cette femme qu’il nomme necessaria mea (Ad familiares, XIII, 72), à savoir une amie intime ou une parente, et il prie ses amis d’être serviables et gentils avec elle. Parmi les thématiques abordées dans leur correspondance figuraient souvent des discussions philosophiques ainsi que des questions financières et politiques, sans doute des questions d’intérêt public (d’après Quintilien, VI, 3, 112, Cicéron écrivait à Cérellia les motifs qui lui faisaient supporter la domination de César) – ce qui a conduit à la publication posthume des lettres que Cicéron avait adressées à son amie. Notre connaissance de Cérellia repose donc presque exclusivement sur les remarques de son ami de plume.
Marella NAPPI