L’étude de la philosophie, associée à la pratique passionnée de l’escalade dans les montagnes galloises qui lui donna le goût du risque, permirent à Emily Hilda Young de se forger une âme de conquérante. D’abord suffragette au cœur de l’action militante, puis « munitionnette » pendant la Première Guerre mondiale, elle ne reculait devant aucun obstacle pour arriver à ses fins. En 1918, après la mort de son époux à la bataille d’Ypres, elle choisit le moment où l’Angleterre reconnaissait la citoyenneté des femmes pour emménager à Londres dans la maison d’un homme marié, son ami et amant de longue date, Ralph B. Henderson, principal d’une école de renom. Elle partagea son quotidien dans le plus grand secret, sans se soucier le moins du monde du scandale qu’ils auraient provoqué s’ils avaient été découverts. Une fois Henderson veuf, elle revint s’établir avec lui dans son Wiltshire natal, région propice aux randonnées dans la nature dont ils raffolaient l’un comme l’autre. Son attachement à la ville de Bristol elle-même marqua nombre de ses œuvres – dont le roman de mœurs
Le Secret de miss Mole (1930) est le plus célèbre. Sa fiction, souvent satirique, redécouverte dans les années 1980, témoigne fréquemment des confits intérieurs qui déchiraient les femmes désireuses de s’émanciper de conventions sociales écrasantes et que peu eurent le cran de défier comme elle.
Martine MONACELLI