Née dans une famille modeste d’un quartier du vieux Madrid, Gloria Fuertes reçoit une éducation soignée jusqu’à l’adolescence. Dès l’âge de 5 ans, elle écrit des contes, accompagnés de dessins, et, à 14 ans, commence à composer des vers, qu’elle récite en 1932 sur les ondes de la Radio nacional de España à Madrid. Elle écrit son premier recueil, Isla ignorada (« île inconnue », publié en 1950) à 17 ans. En 1934, à la mort de sa mère, puis de 1938 à 1958, elle doit travailler dans d’« horribles bureaux », selon ses propres termes. Elle se décrit comme « autodidacte et poétiquement sans école », mais son nom est lié à deux mouvements littéraires : la « génération des années 50 » et le « postisme », mouvement poétique marginal, synthèse d’avant-gardes littéraires précédentes. La guerre d’Espagne la marque profondément ; le pacifisme et la protestation contre l’absurde imprègnent toute sa poésie. Pendant la guerre civile, elle vit à Madrid, aux prises à de grandes difficultés économiques. En 1939, elle parvient à collaborer à la revue Maravillas, et y publie chaque semaine (jusqu’en 1953) des contes et des poésies pour enfants. De 1940 à 1955, elle collabore à la revue féminine Chicas. Pour le supplément pour enfants d’Arriba, elle crée les personnages de Coleta et Pelines, devenus très populaires. En 1951, elle fonde avec Adelaida Lasantas le groupe féminin Versos con faldas (« poésies en jupes »), qui fait des lectures poétiques dans les cafés madrilènes. Elle crée et dirige la revue poétique Arquero (« archer », 1950-1954), avec Antonio Gala, Rafael Mir et Julio Mariscal. Elle reçoit le prix Guipúzcoa de poésie pour Ni tiro, ni veneno, ni navaja (« ni tir, ni venin, ni couteau ») en 1965, et le diplôme d’honneur du prix international Andersen de littérature enfantine en 1968. Grâce à ses émissions à la télévision, dans les années 1970, elle devient la « poétesse des enfants ».
Son œuvre se caractérise par des jeux linguistiques pleins de charme et de simplicité, qui donnent à ses poèmes une grande musicalité. Sa poétique s’appuie sur la langue parlée, ses idiotismes, son aspect familier. Sa perception aigre-douce du monde tisse un univers qui transgresse les aspects académiques afin d’offrir une poésie vraiment populaire (Poeta de guardia, « poétesse de garde », 1968 ; Mujer de verso en pecho, « poétesse de cœur », 1983).
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