Historienne de la Chine contemporaine, Ishida Yoneko fait l’essentiel de sa carrière à l’université d’Okayama, après l’obtention d’une thèse à l’université de Tokyo. Elle mène des enquêtes de terrain en Chine sur la question des anciennes femmes de réconfort et en en tire l’ouvrage Ôdo no mura no sei bōryoku : dānyantachi no sensō wa owaranai (« la violence sexuelle dans les villages du plateau des Lœss : la guerre pour les dānyan n’est pas finie », 2004). La question de la violence sexuelle représente un tournant dans son travail universitaire. Alors qu’elle accordait, jusque-là, la priorité aux archives écrites, ce travail repose sur l’histoire orale et sur un changement paradigmatique face à la question de la honte dans une culture patriarcale. Elle souligne à la fois la violence sexuelle de l’armée japonaise, le système patriarcal de la société chinoise, et le caractère unilatéralement masculin des documents écrits. En montrant que c’est aux plus proches qu’on cache le « passé honteux », elle insiste sur la nécessité de l’adoption d’un point de vue novateur non compassionnel de la part de l’enquêteur pour entendre les voix et recueillir les témoignages des victimes, dans une perspective émancipatrice.
Christine LÉVY