Rien ne destinait Jacqueline Marval à devenir artiste. Dès 1884, ses parents, instituteurs, font d’elle une institutrice suppléante, et c’est en amateur qu’elle peint les paysages du Dauphiné, sous le nom de Marie Jacques. Mariée à un voyageur de commerce dont elle se sépare vite, elle choisit d’exercer à Grenoble le métier de giletière, où peuvent s’exprimer sa fantaisie et son originalité. Dans les années 1892-1895, sa rencontre avec les peintres Joseph François Girot et Jules Flandrin va changer le cours de sa vie. Elle les rejoint à Paris, puis, avec le soutien de Rouault, Camoin, Marquet, Matisse et du sculpteur Léon-Ernest Drivier, elle se lance peu à peu dans la peinture. En 1900, elle signe ses œuvres sous son pseudonyme et participe l’année suivante au Salon des indépendants auquel elle restera fidèle jusqu’en 1914. La galeriste Berthe Weill (1865-1951), soutien efficace des artistes femmes, l’expose en 1902, aux côtés de Matisse, Marquet, J. Flandrin, Petitjean, et Mme Krouglikoff présentera ses œuvres régulièrement. À partir de 1903, ses toiles sont présentes au Salon d’automne ; le marchand Ambroise Vollard les achète jusqu’en 1908, de même qu’Eugène Druet, à partir de 1905. Proche des fauvistes mais plus facilement accessible, elle décore aussi des appartements, ainsi que le foyer de la danse à l’Opéra en 1913. La même année, elle participe à l’Armory Show de New York ; ses tableaux voyageront au cours des années suivantes à Barcelone, Winterthur, Oslo, Bâle, Zurich ; certains d’entre eux sont vendus à l’État français dans les années 1920. Artiste reconnue, elle réalise l’affiche, l’invitation et la couverture du catalogue du Salon d’automne de 1923. Elle milite avec Andry-Farcy, conservateur du musée de Grenoble, en faveur de la création d’un musée d’art moderne. En 1929, le musée des Beaux-Arts de Rouen lui offre une forme de consécration en la présentant conjointement avec Van Dongen, son ami. L’année suivante, J. Flandrin la quitte ; malade, elle abandonne peu à peu la partie et meurt dans une extrême solitude. Son œuvre sera rapidement oubliée ; il faudra attendre la relecture de l’histoire de l’art par les historiennes féministes pour que J. Marval retrouve sa place parmi les fauves.
Catherine GONNARD
Consultez cet article illustré sur le site d’Archives of Women Artists, Research and Exhibitions