Née dans un milieu misérable, d’un père alcoolique et d’une mère à poigne tenant un débit de boissons dans un quartier de prostitution de Copenhague, Johanne Luise Heiberg est la plus célèbre actrice danoise du XIXe siècle. Ayant reçu des leçons de danse dès l’âge de 4 ans, elle danse sur les tables du bistrot. À 8 ans, elle est admise à l’École de ballet du Théâtre royal danois (Det Kongelige Teater) et, à 13 ans, à l’École d’art dramatique, offrant déjà des interprétations sensibles : Juliette dans Roméo et Juliette, de Shakespeare (1828) ; le rôle titre de l’opéra d’Auber, La Muette de Portici (1830). En 1831, elle épouse Johan Ludvig Heiberg, son aîné de vingt et un ans, et entre dans un monde d’intellectuels cultivés. Professeur d’université et auteur dramatique, pour elle, il écrit des vaudevilles romantiques, avec l’inévitable ingénue dans le rôle titre, notamment Trine Rar dans Aprilsnarrene (« les folles d’avril », 1826), et traduit nombre de pièces d’auteurs français, surtout d’Eugène Scribe. Elle écrit elle aussi des vaudevilles : En søndag på Amager (« un dimanche à Amager », 1848), encore un peu joué aujourd’hui, Abekatten (« le singe », 1849) et En Sommeraften (« un soir d’été », 1853). En 1849, son mari prend la direction du Théâtre royal, mais le quitte en 1856, tout comme elle. Après un temps, elle y revient, pour jouer une lady Macbeth remarquée (1860). Ne se sentant pas à l’aise dans les rôles de femmes mûres, elle se retire de la scène en 1864, après avoir tenu plus de 270 rôles en trente-huit ans au Théâtre royal. Après la mort de son mari, elle devient metteur en scène et introduit des auteurs dramatiques modernes comme Ibsen et Bjørnson, mais reste attachée au style romantique. Elle laisse quatre volumes de mémoires.
Alette SCAVENIUS