En mars 1911, des centaines de milliers de femmes manifestent en Europe et aux États-Unis pour leurs droits sociaux et le droit de vote. C’est la première célébration de cette journée internationale après que Clara Zetkin* l’a proposée en 1910 au deuxième Congrès international des femmes socialistes, à Copenhague. Il s’agit d’exigences politiques fondamentales : pour le droit de vote en Allemagne en 1914, pour la paix en 1915, puis contre le fascisme en Espagne et en Italie. L’institutionnalisation de cette journée, dans les pays socialistes (en 1921 en URSS) et dans ceux où le parti communiste est influent, donne lieu à des cérémonies protocolaires. Dans certains pays (Algérie, Russie, Burkina Faso…), c’est un jour férié. En Italie, les hommes offrent du mimosa aux femmes, au Portugal les femmes dînent entre elles. À partir des années 1970, les mouvements de libération des femmes redonnent au 8-Mars son sens politique de lutte et de solidarité internationale ; que ce soit le mouvement des femmes anglaises pour leurs droits en 1971 ou celui des Vietnamiennes en 1974 contre l’occupant américain, le mouvement des Iraniennes en 1979 contre l’obligation du port du voile, la marche de 1986 à Washington contre les conservateurs qui veulent supprimer le droit à l’avortement, ou encore la manifestation de 10 000 personnes à Paris, en 1993, en solidarité avec les victimes des viols de guerre en ex-Yougoslavie. En 1977 l’Onu avait invité les États à officialiser le 8-Mars. La France le fait en 1982, au terme d’une campagne menée par le MLF* afin que soit décrétée une journée chômée et payée pour toutes les femmes, en reconnaissance de leur triple production car : elles mettent au monde et élèvent les enfants, travaillent à la maison et exercent une activité professionnelle ; seul le travail professionnel est reconnu. Aujourd’hui, la mobilisation des femmes est effective un peu partout dans le monde : en Turquie pour le respect de leurs droits, au Bangladesh contre les agressions à l’acide, au Cameroun contre les mariages forcés, en Côte d’Ivoire contre les meurtres de femmes, au Pakistan contre les lois discriminatoires, au Mexique contre les féminicides. Des organisations de femmes se rassemblent dans les pays arabo-musulmans et lancent le 8 mars 2012 un appel « des femmes arabes pour la dignité et l’égalité », afin que les transitions politiques après le « Printemps arabe » n’oublient pas leurs droits. La célébration de cette journée est un moment d’expression politique et culturelle des femmes et la marque de leur solidarité.
Yvette ORENGO et Jacqueline PICOT