Juliette Roche fréquente très jeune la sphère artistique parisienne, grâce à sa marraine, la comtesse Greffulhe, et au filleul de son père, Jean Cocteau. Soutenue par son père, Jules Roche, un homme politique important, elle étudie la peinture à l’académie Ranson. Adoptée très tôt par le groupe des nabis, elle découvre le cubisme en 1912, et rompt alors avec Félix Vallotton et Maurice Denis. En 1913, année phare, elle expose au Salon des indépendants et écrit des poésies, où elle insère, dans le tissu poétique, une phrase toute faite, tel un slogan publicitaire. Elle expérimente également une typographie novatrice qui deviendra encore plus iconoclaste en 1917, avec Brevoort et Pôle tempéré. Sa première exposition personnelle a lieu à la galerie Bernheim-Jeune en 1914. Quand la guerre est déclarée, pacifistes convaincus, l’artiste et son futur mari, le cubiste Albert Gleizes, rejoignent New York, où Duchamp les introduit dans le cercle des collectionneurs animé par Louise et Walter Arensberg. Dès 1915, elle participe aux activités dada, avec Duchamp et Picabia. Après un long séjour à Barcelone, le couple Gleizes, qui expose à la galerie Dalmau, revient à New York ; J. Roche collabore avec Duchamp à la préparation de la première exposition de la Society of Independent Artists (avril 1917), où elle présente quelques œuvres d’inspiration dadaïste. Elle travaille sur le « second degré » : dans Nature morte au hachoir, l’appareil reflète une image décentrée de la guerre. En 1919, de retour à Paris, elle commence la rédaction de son récit, La Minéralisation de Dudley Craving Mac Adam, publié en 1924, évoquant les aventures d’Arthur Cravan et des exilés à New York. En 1921, sa poésie, État… colloïdal, paraît dans Creación, le périodique de Vincente Huidrobro. En 1927, elle fonde avec son mari la résidence d’artistes de Moly-Sabata à Sablons, qui met à disposition des ateliers artisanaux et réunit, entre autres, Anne Dangar (1885-1951), Jacques Plasse Le Caisne. J. Roche est alors une fervente militante de l’éducation artistique populaire. Elle participe épisodiquement à des expositions collectives. Une importante rétrospective lui est consacrée en 1962, à la galerie Miroir à Paris, mais c’est surtout à partir des années 1990 que son rôle dans le mouvement dada est reconsidéré.
Catherine GONNARD
Consultez cet article illustré sur le site d’Archives of Women Artists, Research and Exhibitions