Issue d’un milieu pauvre et traditionnel, Loubna Ahmed al-Hussein devient, après des études en agronomie, une chroniqueuse impertinente dans un journal de gauche, qu’elle doit quitter en 2007 sous la pression de la censure. Elle épouse en 2003 un journaliste soudanais et, prématurément veuve, refuse la coutume de l’enfermement pendant le deuil. Elle travaille au service de la communication de la mission de l’Organisation des Nations unies au Soudan quand elle est arrêtée le 3 juillet 2009 dans un restaurant de Khartoum, en même temps qu’une douzaine d’autres femmes, pour avoir porté un pantalon, vêtement interdit. Ce délit est puni de 40 coups de fouet par l’article 152 du Code pénal. L. Ahmed al-Hussein refuse de plaider coupable, démissionne de son poste afin de renoncer à son immunité diplomatique et, dans le quotidien Al Sahafa, se fait porte-voix des « 20 000 jeunes filles et femmes » arrêtées pour raisons vestimentaires depuis que Omar al-Bachir a imposé la charia au Soudan. Condamnée le 8 septembre 2009 à un mois de prison dans un procès qu’elle a souhaité public en invitant 500 confrères, elle sera libérée : l’Union des journalistes soudanais, proche du pouvoir, a payé l’amende qu’elle refusait de régler afin de médiatiser son combat depuis sa cellule. Impulsé par son exemple, un collectif « Non à l’oppression des femmes » s’est créé pour l’abolition de lois iniques qui les humilient. Menacée, elle a quitté clandestinement le pays et continue d’alerter l’opinion internationale sur la situation des femmes au Soudan. Elle a écrit un premier livre où elle parle également de son excision à l’âge de 7 ans, puis un essai en collaboration avec Djénane Kareh Tager, ancienne rédactrice du Monde des religions.
Annie SCHMITT