Souvent mésestimée par les historiens ou effacée derrière des figures aux accents plus sombres ou romanesques comme Catherine de Médicis* ou Marguerite de Valois*, Marie de Médicis a pourtant marqué la vie politique française de la première moitié du XVIIe siècle, au sortir des guerres de Religion. Satisfaisant les intérêts de la couronne de France dont les grands-ducs de Toscane étaient des financiers privilégiés, le mariage de la fille de François de Médicis et de Jeanne d’Autriche avec Henri IV est conclu en 1600, avec une dot conséquente à la clé. L’assassinat du roi en 1610 propulse la jeune reine au statut de régente, pendant la minorité de son fils, Louis XIII. Son gouvernement se caractérise par le choix de l’alliance avec l’Espagne, concrétisée par la célébration, en 1612, des mariages de ses deux enfants avec des infants, puis par une série de conflits intérieurs et d’agitation accrue des grands de France, renforcée par la supposée faiblesse du pouvoir en place. La contestation aboutit à la convocation des États généraux de 1614, qui représentent un moment décisif dans l’affirmation du pouvoir absolu puisque le pouvoir monarchique s’y impose comme une instance arbitrale nécessaire.
La régence de M. de Médicis est aussi marquée par le ministère de Concino Concini, puis du duc de Luynes, cible de violentes polémiques, comme emblème du règne de la faveur et de l’arbitraire. C’est d’ailleurs par un « coup d’État » entraînant l’assassinat de ce dernier et la disgrâce de sa mère que Louis XIII manifeste sa décision de prendre en main les rênes du royaume (1617). M. de Médicis sera dès lors en conflit constant avec son fils : en témoignent l’épisode connu sous le nom de la « guerre de la mère et du fils » en 1623 et 1624, et surtout sa relégation définitive du pouvoir après la journée des Dupes en 1630, qui marque la victoire à la Cour et auprès du roi du cardinal de Richelieu contre la reine et ses alliés. Désormais en exil (en Belgique, Angleterre et Allemagne) jusqu’à sa mort, la régente déchue réorganisera une cour autour d’elle, qu’elle tentera d’imposer en pôle d’opposition à Louis XIII, suscitant ou soutenant différents troubles. L’importance effective du rôle politique de M. de Médicis reste encore à mesurer : les historiens hésitent souvent, dans l’interprétation de ses actions, entre une analyse qui insiste sur ses ambitions personnelles ou ses qualités de chef de « clan » (le « parti dévot ») et un point de vue mettant en exergue son engagement idéologique au service d’une conception plus traditionnelle du pouvoir monarchique, défendant, à une époque charnière de la sécularisation des pratiques et de la théorie politiques, une vision chrétienne du gouvernement des hommes. Plus largement, son statut pose aussi la question du rapport de la monarchie française aux femmes, exclues du pouvoir par l’invention de la loi salique (invoquée pour la première fois au XVIe siècle), mais investies du rôle de perpétuation de la lignée et surtout pouvant périodiquement exercer une influence politique discrète ou plus affirmée en cas de régence. La position de M. de Médicis à la tête du pouvoir lui a aussi permis d’être active dans la promotion des arts : sa cour des années 1620 s’est révélée être un vivier d’hommes de lettres que Richelieu saura ensuite attirer sous sa propre influence – le poète François Le Métel de Boisrobert, notamment, a reçu une gratification de sa part. Elle est surtout reconnue en tant que commanditaire du palais du Luxembourg, dont les plans ont été dessinés par l’architecte Salomon de Brosse et la décoration intérieure confiée à Rubens, avec en point d’orgue le fameux cycle des 24 tableaux relatant sa propre histoire, exposé dans la galerie inaugurée en 1625.
Mathilde BOMBART