Issue d’une famille originaire du Moyen Atlas, Nadia Chafik enseigne la littérature française à l’université Mohammed V, à Rabat. Sa carrière d’écrivaine débute au cours des années 1990 alors qu’on assiste au Maroc à l’émergence d’une littérature féminine de contestation, encouragée par une vie associative en pleine effervescence. La plupart de ces auteures ont opté pour la langue française afin d’exprimer la révolte et les revendications des femmes dans des milieux où le poids d’une tradition renforcée par une orthodoxie religieuse oppressante est omniprésent. Fille du vent (1995) s’inspire d’événements authentiques qui servent à la romancière de canevas pour tisser sa fiction. Dans Le Secret des djinns (1998), l’histoire se déroule à Casablanca après le bombardement des Alliés. Jabrane, après une réclusion de quarante ans, qui rappelle la légende des sept dormants d’Éphèse, se trouve confronté à la cruauté d’un monde nouveau où il parvient à survivre grâce à la seule magie des mots. À l’ombre de Jugurtha (2000) se situe pendant la colonisation française au Moyen Atlas, présenté comme terre du légendaire roi amazigh. Dans ces montagnes, l’auteure suit son personnage qui a quitté Paris pour rejoindre un lieutenant français, mais s’éprend d’un jeune et beau guerrier berbère : on assiste donc à la rencontre inopinée de deux cultures. En 2005, N. Chafik publie un recueil de nouvelles, Nos jours aveugles, où elle esquisse des portraits de femmes et d’hommes partagés entre tradition et modernité. Dans sa peinture de la société marocaine, l’auteure cherche à se démarquer des points de vue sous-jacents à la littérature coloniale et à la littérature orientaliste dans leur représentation du royaume chérifien.
Selma EL-MAADANI