Bien que leur œuvre ne figure pas dans l’histoire traditionnelle du modernisme, Norah Aiton et Betty Scott ont conçu le plus ancien bâtiment industriel du mouvement moderne britannique : les bureaux de l’usine Aiton & Co (Derby 1930-1931). Après avoir entamé des études à la Cambridge School of Architecture (1924-1926), N. Aiton les achève à l’Architectural Association de Londres (1926-1929), où elle rencontre sa future partenaire professionnelle, B. Scott. Celle-ci y étudie de 1923 à 1928. Le modernisme est dans l’air, même s’il ne figure pas au programme d’études. N. Aiton visite l’Exposition universelle de Paris en 1925 et fait un tour du monde de l’architecture, pendant que B. Scott travaille pour un grand cabinet new-yorkais. Elles s’associent en 1930, et le père de N. Aiton leur confie la réalisation de son entreprise, vitrine des « nouveaux matériaux » – verre, acier et béton armé. Pour l’aménagement intérieur, d’une saisissante sobriété, elles conçoivent un escalier doté d’une rambarde courbe en acier et des bureaux assortis aux chaises en acier chromé de Marcel Breuer (1902-1981), sorties directement du catalogue de Thonet. L’architecture néerlandaise leur inspire l’utilisation d’autres matières : volumes interlocking (« emboîtables »), fenêtres métalliques et mobilier d’architecte. En façade, le rouge, le vert jade, le bleu, le gris et le blanc composent ce que N. Aiton appelle « ma version de la palette de couleurs du Stijl ». Ayant de la famille aux Pays-Bas, elle s’y rend fréquemment, travaillant comme stagiaire dans un cabinet d’architectes, et admire notamment la maison Rietveld-Schröder (Utrecht 1924). Refusant de se laisser cantonner à l’architecture domestique, N. Aiton et B. Scott ont également conçu des bureaux d’usine, une imprimerie, un crématorium, une église, un zoo privé, ainsi que des maisons individuelles, pour lesquelles, contrairement à leurs réalisations d’Aiton & Co, la décoration intérieure et le mobilier évoquent souvent l’art déco.
Lynne WALKER