Auteure, en népalais, de dix romans, trois recueils de poèmes et plusieurs essais, Parijat est une grande figure de la littérature népalaise. Sa vie est marquée par les épreuves. Elle qui perd sa mère très tôt et dit n’avoir « jamais connu l’amour maternel » est atteinte dès l’âge de 13 ans d’arthrite rhumatoïde, devenant gravement handicapée à partir de 26 ans. Elle s’installe au Népal en 1954 et poursuit ses études à Katmandou. Là, elle rencontre une élite éduquée émergente qui cherche à s’émanciper du joug de l’hindi : Ishwar Baral, célèbre critique littéraire, lui apprend l’anglais, tandis que Shankar Lamichhane, essayiste de renom, relit ses manuscrits. Elle se lie d’amitié avec de nombreuses personnalités de gauche, comme le leader communiste Nirmal Lama, qui épouse sa sœur Sukanya, et de jeunes poètes, musiciens et artistes associés au mouvement Ralpha. Issue de l’ethnie Tamang, Parijat décide d’écrire en népalais et, comme la plupart des écrivains népalais de cette époque, se consacre tout d’abord à la poésie. Après un poème et des nouvelles, elle atteint la célébrité avec le roman
La Fleur bleue du jacaranda (1965), qui explore la vie sentimentale et sexuelle d’un soldat à la retraite. Ce premier personnage inaugure une longue série d’anti-héros, souvent sans nom, qui peupleront ses romans ultérieurs, parmi lesquels
Mahattahin (« l’ignoble », 1968) ;
Baisko manche (« le jeune homme », 1972) et
Parkhalbhitra ra bahira (« en dedans et en dehors des murs », 1978).
La Fleur bleue lui a valu le prestigieux prix Madan purashkar et a fait l’objet de 16 éditions et de plusieurs traductions, notamment en anglais et en français. Parijat devient une star, mais la vie qu’elle passe, alitée chez sa sœur, est assombrie par le tourment et l’amour impossible. Elle dit n’avoir rien inventé, mais seulement exprimé les émotions les plus cachées, notamment celles liées à la sexualité. Inspirée par les écrivains existentialistes, elle est souvent qualifiée de nihiliste, voire de nihiliste révolutionnaire. Restée toute sa vie très proche des milieux de gauche, elle est à l’origine de l’Association des écrivains progressistes. Les écrivains maoïstes qui ont fleuri avec la guerre du Peuple (1996-2006) revendiquent son héritage.
C.K. LAL et Marie LECOMTE-TILOUINE