Née aux États-Unis de parents anglais, Phyllis Kaberry émigre en Australie quelques années plus tard et suit des études d’anthropologie à l’université de Sydney. Elle mène sa première grande enquête de terrain dans le nord-ouest de l’Australie, dans les groupes kija (Lunga), walmajarri, worla, miriwoong, jaru et bunuba. Son travail d’anthropologue a remis en cause une idée largement répandue selon laquelle les femmes aborigènes étaient mises à l’écart des activités politiques et religieuses en décrivant minutieusement la vie quotidienne des femmes kija et leurs cérémonies secrètes. Il a aussi mis en lumière le vaste système d’échanges économiques, religieux et politiques connu sous le nom de
wurnan qui unit des partenaires à travers une partie du pays. Sa thèse,
Aboriginal Woman : Sacred and Profane, est publiée en 1939 à Londres. En 1945, le Colonial Social Science Research Council lui demande de mener une enquête sur la malnutrition dans la région de Bamenda au Cameroun. Elle passe quarante-six mois parmi le peuple Nso et une longue relation de confiance se tisse entre elle et les femmes nso pour qui elle s’engage politiquement auprès de l’administration britannique, chose rare pour les universitaires de l’époque. Les résultats de ses recherches africaines sont publiés en 1952 dans
Women of the Grassfields. À partir de 1949, elle enseigne l’anthropologie à l’University College de Londres et devient vice-présidente du Royal Anthropological Institute of Great Britain. Elle est considérée comme une pionnière dans des domaines aussi différents que les
gender studies, l’anthropologie des religions, l’anthropologie des systèmes économiques et l’étude de l’impact colonial sur les populations autochtones. P. Kaberry a modifié le regard occidental sur les sociétés extra-européennes en plaçant, pour la première fois, l’observation du point de vue des femmes.
Arnaud MORVAN