Écrivaine active dans les années 1950 et 1960, Salmi Manja a écrit des poèmes et des nouvelles, puis des romans. Certains écrivains malaisiens célèbres l’ont initiée à l’écriture littéraire, comme Harun Aminurrashid, dont elle suit les cours, Usman Awang, avec qui elle entretient une correspondance, et A. Samad Said qu’elle épouse. Son travail de professeure de religion et de journaliste a influencé les thèmes de ses œuvres, notamment dans ses romans Sayang Ustazah Sayang (« dommage, professeure de religion, dommage », 1968) et Hari Mana Bulan Mana (« quel jour, quel mois », 1960). Le premier s’intéresse à la vie d’une école coranique et aux problèmes de ses enseignantes et de ses élèves. Il y est question notamment de deux femmes battues. Le second décrit les expériences d’une journaliste voulant devenir romancière et faisant, entre autres, un reportage sur les mariages malais. Salmi Manja met surtout en scène dans ses œuvres des personnages féminins. Ce sont des femmes qui travaillent (institutrices, professeures de religion, journalistes, ou autres), mais aussi des femmes qui sont économiquement dépendantes de leur mari ou de leur père. Elle critique le mariage forcé et précoce, ainsi que les hommes, qu’elle trouve égoïstes et prétentieux. Dans Hendak Hujan Hujan Sekali (« il va pleuvoir, il pleut beaucoup », 1967), le père de Zainab l’oblige à épouser un riche commerçant, âgé et polygame. Dans Dari Mana Punai Melayang (« d’où s’envole le pigeon vert », 1961), la mère de Karima Ani accepte finalement le choix de sa fille. L’écrivaine s’intéresse aussi aux difficultés des femmes après un divorce (notamment dans Hari Mana Bulan Mana), dues, selon elle, au fait que les hommes peuvent facilement divorcer et que le cadi, juge de droit musulman, prend souvent parti pour eux, faisant peser tous les torts sur les femmes.
Monique ZAINI-LAJOUBERT