Bien que son lieu de naissance ainsi que la date et le lieu de sa mort demeurent inconnus, Serena de Tous vécut à Barcelone durant la seconde moitié du XIVe siècle. Quant à ses œuvres, seules subsistent les 18 lettres adressées à son mari, Ramon de Tous, administrateur de la comtesse María de Luna (1358-1406), épouse du roi Martín Ier. Cette correspondance révèle la situation précaire de la jeune femme, due à la peste et à la famine. Elle s’occupe des affaires familiales en l’absence de son mari, parti en Aragon gérer les propriétés de la comtesse. Ses lettres reflètent ses sentiments − regrets, solitude, amour pour son époux − et ses états d’âme − tristesse, mélancolie, joie. Les problèmes qu’elle rencontre sont exposés dans le moindre détail à son destinataire : le prix des marchandises, les commandes qu’elle reçoit et qu’elle fait sont de précieuses informations sur la situation commerciale de l’époque. Elle est beaucoup plus jeune que lui, et cet échange épistolaire lui permet de se confier à celui qui est à la fois son amant et son conseiller. Dans les premières lettres, elle se montre amoureuse, le prie de revenir ; lui espace les réponses, ce qu’elle lui reproche ironiquement. Elle devient jalouse, imagine un amour aragonais, car leurs retrouvailles à Barcelone se font rares. Elle l’informe des événements sociaux, naissances, mariages et décès, des questions de la cour, évoque leurs amis communs. Elle mène une vie active, se montre d’une grande prudence quant à l’économie domestique et fait preuve de solidarité : elle soigne la reine Guillemona de Togores, malade, et s’en occupe chez elle personnellement. En 1376, Ramon de Tous, souffrant, songe à retourner à Barcelone, mais il meurt à Lleida, où il est enterré.
Concepció CANUT