Fille de deux membres du parti communiste, cette enfant de la Révolution culturelle, bien que tibétaine, est élevée et éduquée comme une Chinoise. Après avoir étudié la littérature à l’Université des nationalités du Sud-Ouest, Tsering Woeser commence sa carrière comme reporter pour le Ganzi Daily Newspaper (« Kardze », en tibétain), puis opère un retour aux sources en s’installant à Lhassa comme rédactrice en chef du journal Tibetan Literature and Art, « Xizang Wenyi ». Elle publie un recueil intitulé Xīzàng Zài Shàng (« Tibet d’en haut ») en 1999 et devient une écrivaine reconnue, appartenant au Chinese Writer’s Group. Composé d’auteurs tibétains écrivant en chinois, il est tenu en haute estime par la critique. En 2003, la publication de Xijang Biji (« notes sur le Tibet »), un recueil de nouvelles à grand succès, fait d’elle l’ennemie des autorités chinoises qui l’érigent en menace pour « l’unité de la nation » et interdisent la diffusion de son livre. Renvoyée de son travail, elle s’exile à Pékin, publie ses ouvrages à Taïwan et tient un site Internet critique à l’égard du pouvoir chinois. Surveillé par les autorités, le site est victime de plusieurs attaques informatiques en 2008 et 2010, notamment de la part d’un groupe de hackers nationalistes, The Chinese Hongke Alliance, qui appelle à la violence contre l’auteure. Sa maîtrise de la langue chinoise et l’utilisation massive des médias alternatifs (Internet, blogs, Tweeter, Facebook) permettent à T. Woeser d’être la voix de la culture jusqu’ici cachée ou opprimée des Tibétains. Malgré sa notoriété internationale, attestée par plusieurs prix, le gouvernement chinois surveille et limite ses déplacements, lui refuse toute sortie du territoire et l’arrête à plusieurs reprises en 2007 et en 2008.
Audrey CANSOT