Encore lycéenne, Yoshida Takako fréquente les salons et les bibliothèques où les intellectuels et les artistes se rencontrent. En étudiant avec un Français en séjour au Japon, elle découvre le plaisir de composer de la musique. Attirée par les chansons écrites par Hashimoto Kunihiko (1904-1949), elle travaille la composition avec lui. Elle est également charmée par la musique d’Erik Satie. Elle débute sa carrière en 1931 avec des pièces pour piano et chant, où s’entend une sonorité musicale d’inspiration traditionnelle qui impressionne le public. L’époque démocratique de Taishō passée, le Japon connaît le développement du fascisme et du nazisme. Fille d’un militaire, Yoshida Takako s’est paradoxalement révoltée contre le militarisme, et s’est engagée toute sa vie dans le mouvement de la libération des femmes et contre la guerre. Reniée par sa famille et ses amis, elle participe avec enthousiasme au mouvement du prolétariat japonais. Elle crée un ensemble musical pour présenter sa musique et la musique traditionnelle d’autres pays, avec l’objectif de produire une « musique du peuple ». En 1940, accusée pour la quatrième fois de « pensées dangereuses », elle est condamnée à six mois de prison. Elle tombe malade lors de ce séjour, et reste affaiblie jusqu’à la fin de la guerre. Rétablie, Yoshida Takako reprend ses activités créatives et compose en 1948 des œuvres vocales, à partir des poèmes d’une poétesse reconnue, très engagée elle aussi, Yosano* Akiko. En 1952, elle compose une Sonate pour violon (1952) et meurt avant d’achever son grand projet de créer un opéra à partir de ses œuvres vocales. Révoltée et engagée, reflétant la pensée de son auteure, sa musique demeure liée au développement du mouvement du prolétariat au Japon. Elle laisse de nombreuses pièces de musique pour théâtre (Kazan Haiji, 1938) et de la musique de chambre, mais les œuvres vocales occupent une place primordiale dans sa production.
CHEN HUI-MEI